Harcèlement managérial

Le harcèlement moral est défini par l'article L 1152-1 du Code du travail, aux termes duquel aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

 Il résulte de ce texte que le harcèlement moral se caractérise essentiellement par la dégradation des conditions de travail résultant d'actes répétitifs (non définis) susceptibles d'avoir des conséquences dommageables sur le plan professionnel ou sur la santé de la victime, l'auteur du harcèlement important peu dès lors qu'il survient dans le cadre professionnel.

Le harcèlement moral peut être caractérisé par un harcèlement managérial. Lorsqu’une organisation défaillante, un climat délétère, des méthodes de gestion du personnel provoquent un mal être des salariés, le harcèlement moral est relevé.

Ainsi, « peuvent caractériser un harcèlement moral les méthodes de gestion mises en œuvre par un supérieur hiérarchique dès lors qu’elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d’entrainer une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel » (Cass. Soc., 10 novembre 2009, n°07-45.321).

Le harcèlement collectif, au sens ou tout ou partie des salariés sont concernés par les pratiques managériales délétères, peut être sanctionné, à partir du moment ou un ou plusieurs salariés sont visés par ces pratiques.

Il convient néanmoins que le salarié qui se plaint du harcèlement moral en soit personnellement victime (Cass. Soc., 28 mars 2012, n°10-24.441).

Au fil de sa jurisprudence, la Chambre sociale de la Cour de cassation a étendu la qualification de harcèlement managériale, sanctionnant les manquements directionnels attentatoire à l’honneur, la dignité, la santé et la carrière du salarié.

« Les salariés ne peuvent pas être déboutés de leurs demandes au titre d’un harcèlement moral au motif que celles-ci portaient sur des considérations trop générales sur les méthodes de gestion de l’employeur alors que plusieurs salariés témoignaient, d’une part, de pressions en matière d’objectifs, imposées aux directeurs de projets, aux responsables de projets, aux chargés de terrain, aux superviseurs et aux téléconseillers par une organisation très hiérarchisée du directeur de site et qui se traduisaient par une surveillance des prestations décrite comme du "flicage" et, d’autre part, d’une analyse de leurs prestations qu’ils ressentaient comme une souffrance au travail » Cass. Soc. 3 mars 2021, n° 19-24.232

Il a été indirectement jugé qu’il incombe à l’employeur, eu égard à son obligation de sécurité de résultat et la protection de la santé physique et morale du salarié, de désapprouver immédiatement les manquements délictuels de harcèlement commis par le manager.

De tel sorte que, en ce cas, le salarié ne pourra pas être licencié pour faute grave ou pour cause réelle et sérieuse, dans la mesure où son comportement fut le résultat d’une position managériale partagée et encouragée par l’ensemble des supérieurs hiérarchiques : Par un arrêt du 12 juillet 2022 , la Cour régulatrice a précisé la responsabilité de l’employeur vis à vis du manager auteur des faits de harcèlement moral.

Ainsi, les méthodes managériales pratiquées au sein d’une entreprise, indépendamment du rang du manager, engagent la responsabilité de l’entreprise : « S’agissant des faits de harcèlement moral imputés au salarié, que les méthodes managériales de ce dernier envers une autre salariée n’étaient ni inconnues, ni réprouvées par sa hiérarchie avec laquelle il avait régulièrement partagé ses constats relatifs à l’insuffisance de sa collègue et avait conduit en lien étroit avec elle un processus de changement et de réorganisation au sein de la direction dont il avait la charge.

Elle a ajouté que le salarié avait agi en concertation avec son supérieur hiérarchique et le directeur des ressources humaines et que l’employeur avait d’ailleurs pris fait et cause pour lui en défendant les décisions prises en réponse aux doléances de l’époux de la salariée qui se plaignait de harcèlement. La cour d’appel a pu en déduire, sans violer le principe de la contradiction, que le comportement du salarié, qui était le résultat d’une position managériale partagée et encouragée par l’ensemble de ses supérieurs hiérarchiques, ne rendait pas impossible son maintien dans l’entreprise » Cass. Soc.,12 juillet 2022, n° 20-22.857

Enfin il a été reconnu que la surcharge de travail pouvait être constitutive d’un harcèlement moral. Ainsi, un salarié a vu la charge de travail qui lui était confiée s’accroître de manière très importante, sans être réalisable sur son seul temps de travail dans l’entreprise.

"La Cour d’Appel, ayant constaté notamment que cette réalité n’était pas temporaire mais véritablement instituée de façon durable à l’encontre du salarié, de sorte que même les heures supplémentaires en nombre raisonnable ne lui suffisaient pas pour accomplir les tâches imposées par son employeur, a condamné l’employeur pour harcèlement moral" (CA Lyon 12 décembre 2007). « Une surcharge de travail peut être constitutive de harcèlement moral, si elle trahit le dépassement de la limite de l'exécution du pouvoir de direction. »

L'article L. 4121-1 du code du travail impose à l'employeur une obligation de sécurité à l'égard de ses salariés et , en cas de dégradation de la santé de ceux-ci compte tenu de leurs conditions de travail , il lui appartient de justifier des démarches et mesures prises pour assurer la sécurité physique et morale de ses salariés.

Dès lors qu'ils peuvent être mis en rapport avec une dégradation des conditions de travail, les certificats médicaux produits par le salarié figurent au nombre des éléments à prendre en considération pour apprécier l'existence d'une situation de harcèlement, laquelle doit être appréciée globalement au regard de l'ensemble des éléments susceptibles de la caractériser. 

Le harcèlement moral est également un délit visé à l'article  222-33-2 du code pénal : "Le fait de harceler autrui par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende."

Harcèlement moral